14-18, Monnaie ou troisième front, Monnaie de Paris

Pour le Centenaire de la Grande Guerre 1914-1918, cette exposition en trois parties présente les modifications des systèmes monétaires français et allemand générées par la Première Guerre mondiale, notamment:
1. La disparition de l’or de la circulation et la communication concernant sa remise à l’État
2. Le développement de la monnaie d’urgence (en particulier le papier) et de ses utilisations
3. Art de papier de guerre allemand

MONNAIE OU LE TROISIÈME AVANT PENDANT LA GRANDE GUERRE
Premièrement, il y avait deux fronts pendant la Grande Guerre: le premier était un front sanglant et militaire, tenu par des soldats dans les tranchées, sur la mer et dans les airs. Le second était un front laborieux, ou derrière les lignes, tenu par des mineurs, des ouvriers et des agriculteurs. Pendant cette guerre de positions et d’attrition, le premier front protégeait le second qui permettait au premier de résister à l’ennemi. Cependant, aucun des deux fronts n’aurait pu résister si le troisième n’avait pas été mis en place, même avant le début de la guerre: un front monétaire!

L’exposition souhaite expliquer cette période clé de l’histoire monétaire moderne, caractérisée notamment par la démonétisation progressive de l’or puis de l’argent et par l’utilisation croissante du papier-monnaie (et des chèques postaux) à travers sa collection exceptionnelle et des documents d’archives prêtés par des institutions partenaires. La mobilisation monétaire d’une armée d’épargne, pour reprendre le dicton de cette période! En outre, l’exposition a mis en lumière des productions d’outre-Rhin de la même époque, que l’on peut facilement qualifier de « inhabituelles »!

UNE EXPOSITION GRÂCE À L’INVENTAIRE DU MUSÉE
Depuis 2002, les musées français sont légalement tenus de vérifier les collections tous les dix ans. Le processus de vérification garantit que les collections sont conformes au contenu répertorié dans les inventaires. Le 11 musée Conti – labellisé «Musée de France» – doit être conforme à la réglementation et a déjà vérifié plus de 120 000 objets. Bien que rigoureux, le processus de vérification est également une occasion pour les équipes de conservatoires d’examiner toutes les collections.

Au cours de l’opération, la collection de billets de banque à la Monnaie de Paris (26.150 pièces) a pris une importance particulière, en particulier le nombre considérable d’articles de la période de 1880 à 1930. Cette exposition est le résultat de l’inventaire du musée. mettre en évidence les changements monétaires intervenus pendant la guerre 1914-1918. Ou quand les objets parlent d’eux-mêmes de leur temps et de la vie quotidienne des citoyens.

Depuis 2002, les musées français sont tenus de se conformer à une nouvelle loi relative à la vérification décennale de l’inventaire, qui vérifie que l’état des collections correspond à ce qui est écrit dans les registres d’inventaire. Le Musée du 11 Conti – labellisé «Musée de France» – ne fait pas exception et a déjà contrôlé plus de 120 000 objets. Processus long et fastidieux, il offre aux équipes de conservation l’occasion d’inspecter l’ensemble de la collection. C’est ce qui a conduit à la mise au jour de la collection de 26 150 billets de la Monnaie de Paris, en particulier d’un nombre important d’articles datant de 1880 à 1930. L’exposition, issue du processus de vérification des stocks, a pour objectif de mettre en évidence les transformations monétaires. qui se sont produits pendant le conflit de 1914-1918.

Il y a deux fronts qui marquent la Grande Guerre. Le premier, militaire et sanglant, tenu par des soldats dans les tranchées, par mer et dans les airs. La seconde, «par derrière», laborieuse et tenue par des mineurs, des ouvriers et des paysans. Dans cette guerre d’attrition dans les tranchées, chaque front travaille pour aider l’autre. Pourtant, ni l’un ni l’autre n’aurait pu tenir si un troisième front monétaire n’avait pas été établi avant le début de la guerre! L’exposition cherche à mettre en lumière les transformations monétaires intervenues en France à la suite du conflit. Il se concentre également sur la démonétisation progressive de l’or, puis de l’argent, ainsi que sur l’augmentation de l’utilisation de papier-monnaie. Au-delà, l’exposition offre une perspective des productions allemandes de la même période, que l’on pourrait facilement qualifier d’atypique.

1. L’effort de guerre
1918 France: les dépenses publiques liées à la guerre s’élèvent à près de 150 milliards de francs. Comment le conflit a-t-il été financé? Et quel impact cela a-t-il eu sur la circulation quotidienne de l’argent? Les obligations de guerre et la «campagne de l’or» ont joué un rôle clé.

La circulation de l’argent en France en 1914
À la veille de la Première Guerre mondiale, l’or et l’argent circulaient quotidiennement et étaient des vecteurs de symboles emblématiques: le coq de l’aumônier graveur sur des pièces de 10 et 20 francs et la semeuse d’Oscar Roty sur des pièces de 1 et 2 francs. Tout semblait aller bien. Pourtant, les tensions politiques montaient. Depuis la défaite de 1870 contre la Prusse, la France se préparait à se venger et ses dépenses en armes continuaient d’augmenter. Un plan secret a été établi, selon lequel, en cas de conflit, la convertibilité de l’or, ainsi que la conversion progressive des pièces d’or et d’argent en billets de même valeur, seraient suspendues. Tout semblait prêt du côté français! Le 3 août 1914, l’Allemagne déclara la guerre à la France. Tout le monde pensait que ce serait une guerre éclair…

La délocalisation d’ateliers et de nouvelles formes de monnaie
Afin d’empêcher l’avancée de l’ennemi, la production de pièces métalliques – qui se produisait jusque-là à l’hôtel de la Monnaie de Paris – est délocalisée en 1914 à Rochefort (Charente-Maritime) et à Casltelsarrasin (Tarn-et-Garonne). Par décret du 10 juillet 1914, le poids de tous les types de centime (en cuivre puis en cuivre-nickel) a diminué, comme en témoignent les fameuses «pièces de monnaie percées» de 10 et 25 cents signées par Lindauer. Cependant, la France avait besoin d’un franc fort, notamment pour obtenir des crédits auprès de banques anglo-saxonnes. À partir de mars 1915, l’émission de pièces de monnaie était limitée, ce qui accentuait l’effet de pénurie au niveau local. Quant à l’or qui devait assurer la crédibilité de la France, il fallait le sortir des bas de laine!

La «campagne de l’or»
«Afin de mettre fin à la guerre de manière victorieuse, échangez votre or contre des billets de banque», proclamez des affiches! Les pièces d’or «au coq» sont devenues des acteurs d’une campagne de propagande destinée à vaincre l’ennemi. Pour cette raison, et pendant que les soldats versaient leur sang, la célèbre affiche d’Abel Faivre «Donnez votre or pour la France» est une déclaration extraordinaire. Les soldats sacrifieront souvent plus que de l’or …

Obligations de guerre et emprunts de guerre
«Parce que la France doit être riche pour être forte», proclament des affiches, les Français peuvent désormais investir dans des obligations de guerre émises par le Trésor. Avec des valeurs allant de 100 à 1 000 francs, ces obligations étaient valables de 3 à 12 mois et payaient un intérêt de 5% payable à l’avance! En l’absence de solutions alternatives, le succès est immédiat: entre 1914 et 1918, 30 milliards de francs sont réunis. Alexandre Ribot, ministre des Finances, préconise également le lancement de ce qu’on appelle «Suivez-nous! 3. L’ART LÉGENDAIRE DE NOTGELD Loin d’une vision de crise et de malheur, les Notgeld allemand et autrichien offrent une vision différente de l’argent de secours. Outre la qualité de la gravure (xylographie, ciseau sur cuivre, gravure ou papier vergé), il existe un style, une couleur, un sens profond de l’exaltation et un récit national. Ces formes d’argent sont, non sans raison, traités avec un soin particulier par les autorités. L’hyperinflation de la République de Weimar (1918 – 1933) En 1918, la fin de la guerre s’annonce et, avec elle, la défaite de l’Allemagne. L’effondrement économique attend. Pour pouvoir rembourser sa dette, la République de Weimar (créée le 9 novembre 1918) a promu un système d’hyperinflation. En «jouant» avec l’impression de notes, l’État a imprimé des milliers, des millions, voire des milliards de marks… Une marque qui ne vaut plus rien! Billets de banque «collectionneur» C’est dans ce contexte que s’est développé le phénomène étonnant du Notgeld (pièces de monnaie d’urgence allemandes et autrichiennes). Ces obligations de «consolidation» locales. Ce fut un autre succès, la collecte de fonds en 1918 atteignant près de 55 milliards de francs! La presse n’a pas eu tort d’appeler Ribot, à la tête d’une véritable «armée d’épargne»,

2. « Papier s’il vous plaît, papier! » De pièces de monnaie et notes à des jetons d’argent
«Papier s’il vous plait, papier!» Était l’appel lancé par Louis Latzarus à la fin de son article «La frappe des pièces», publié dans le journal L’Avenir. Bien que daté de 1920, cet appel témoigne du manque récurrent de petites pièces depuis le début du conflit. Une pénurie si criante qu’au 1er août 1914, les ventes ne pouvaient plus se faire à crédit. Tous les achats devaient être effectués en espèces. Les salaires étaient payés quotidiennement en petite monnaie. Par nécessité, les autorités locales, avec l’accord implicite de l’État, se sont réunies pour faire face au problème, soulageant ainsi l’État.

La situation dans la zone occupée
Dans les dix départements entièrement ou partiellement occupés de 1914 à 1918, les municipalités ont continué à émettre des pièces de monnaie. À partir d’août 1914, Nancy, puis Lille et Roubaix ont lancé l’émission de «Coupon money». Ces villes ont été rapidement suivies par la plupart des autres dans la zone occupée. Comme ces monnaies locales n’avaient pas de contre-valeur (équivalent monétaire légal), il s’agissait de créations monétaires reposant exclusivement sur la confiance entre les utilisateurs et les commerçants. Il est important de se rappeler qu’en 1916, les forces d’occupation avaient stipulé que les jetons devaient être émis à l’échelle d’unions communales.

La situation dans la zone franche
Dans la zone franche, ce sont principalement les chambres de commerce qui gèrent l’avenir de la monnaie de papier. Limoges, Paris et Lyon ont ouvert la voie en août 1914. Toute la France – y compris ses colonies – était touchée par le phénomène … Bien que l’existence officielle de cette monnaie locale ait été adoptée par l’État, cela ne s’est pas fait de manière légale. contexte et sa diffusion n’a été tolérée que par les autorités. Cependant, contrairement aux monnaies communes de la zone occupée, ces jetons représentent clairement la répartition des paiements légaux effectués à la Banque de France en espèces ou en obligations de guerre. La Banque de France n’a pas créé la monnaie de nulle part, les obligations avaient une valeur équivalente à la monnaie existante. Le privilège de la Banque de France est resté intact. En fin de compte, entre août 1914 et mai 1924, date de la dernière publication, près de 668 millions de francs en espèces d’urgence ont été émis par 124 chambres (sur 150). Des jetons en carton et en aluminium ont été fabriqués à la fin de la guerre et même plusieurs années après la fin du conflit. Les timbres monétaires brevetés FYP («Fallait y penser») qui se traduit par «Il faut y penser» sont particulièrement frappants!

Chèques-repas En plus de l’argent d’urgence, des chèques-nourriture existaient également. Ces tickets en carton ont été distribués par des organisations (le Comity for Relief en Belgique, par exemple), chargées d’aider à nourrir la population civile ou militaire, qu’elle soit libre ou dans des camps de détention. D’autres billets, émis par de petites entreprises, existaient pour des échanges plus petits. En ce qui concerne les camps de détention, les tickets d’aide ont permis d’améliorer la vie quotidienne des détenus en leur permettant d’acheter du tabac ou du papier à lettres.

L’échange de jetons Fin 1918: la réserve d’or n’avait pas atteint les 20% de la masse fiduciaire * en circulation! La couverture en métal était insuffisante pour rétablir la convertibilité du franc à ses formes antérieures. Et le retour de l’offre financière a consisté à attendre des paiements trop importants pour l’État. Les pièces étaient et devaient rester fiduciaires, sans retour à l’étalon-or. Ces formes d’argent d’urgence ont néanmoins été progressivement remboursées (et annulées par des perforations ou des timbres) en monnaie officielle. Ce n’est qu’en 1926 (avec une loi du 13 janvier) que la circulation des formes de monnaie d’urgence a été interdite en permanence, au profit des pièces de monnaie de l’État dont la circulation, qui était déjà effective, devait devenir exclusive à partir de ce moment.

3. L’art légendaire de Notgeld
Loin d’une vision de crise et de malheur, les Notgeld allemand et autrichien offrent une vision différente de l’argent d’urgence. Outre la qualité de la gravure (xylographie, ciseau sur cuivre, gravure ou papier vergé), il existe un style, une couleur, un sens profond de l’exaltation et un récit national. Ces formes d’argent sont, non sans raison, traitées avec un soin particulier par les autorités.

L’hyperinflation de la République de Weimar (1918 – 1933)
1918, la fin de la guerre se profile et avec elle, la défaite de l’Allemagne. L’effondrement économique attend. Pour pouvoir rembourser sa dette, la République de Weimar (créée le 9 novembre 1918) a promu un système d’hyperinflation. En «jouant» avec l’impression de notes, l’État a imprimé des milliers, des millions, voire des milliards de marks… Une marque qui ne vaut plus rien!

Billets de banque «collectionneur»
C’est dans ce contexte que l’étonnant phénomène des Notgeld (pièces d’urgence et billets de banque allemands et autrichiens) s’est développé. Ces notes locales, émises pour la première fois pendant la guerre, ressemblent beaucoup aux équivalents français, tant par leur mode d’émission que par leur esthétique. Cependant, de 1922 à 1923, le phénomène a étonnamment commencé à changer. Afin d’éviter d’échanger leur devise contre une monnaie légale, les villes (les principaux émetteurs) en soulignant la qualité et la beauté des billets ont encouragé les citoyens à les conserver! Les notes ont ainsi émergé avec une qualité graphique et une originalité thématique sans précédent à l’époque. Dans la plupart des cas, des billets de même valeur mais de motifs différents ont été émis, même avec des pochettes «collectionneurs»!

Série emblématique
Ces notes fonctionnent souvent en série. La série Erfurt (1921) mentionnée concerne le quatrième centenaire de l’arrivée de Luther en 1521 devant la diète de Worms. L’iconographie des remarquables notes de Naumburg évoque la Hussiten-Kirschfest, une célébration commémorant le siège de la ville par les Hussites en 1432. Les faits rappelés dans une chanson de K.-F.Seyferth écrite en 1832 et illustrée par Walter Hege, en 1920, la série des 12 Notgeld de la ville. Quant aux billets de banque de Poßneck, ils font écho à Hermann et Dorothea (1797) de Goethe, censés avoir eu lieu dans la ville, et qui mettent en valeur les valeurs et les vertus du travail de la bourgeoisie.

L’Allemagne et ses frontières
Les billets de banque ne manquent pas de poser la question de l’unité de l’empire allemand au lendemain du conflit. Les références aux plébiscites sont abondantes – imposées par le Traité de Versailles (28 juin 1919) – qui permet aux populations (et aux nationalités) vivant près de la frontière de décider si elles appartiennent ou non au territoire allemand: Slevig, Süderbrarup vis-à-vis du Danemark voisin et Johannisburg en Pologne. Les billets évoquent également le rêve africain que l’Allemagne avait développé au Cameroun, au Togo, en Namibie, au Rwanda… autant de colonies que le même Traité de Versailles redistribuerait aux vainqueurs.

Matériaux curieux pour les billets
Comme les billets de banque en papier aux couleurs vives, les organismes émetteurs allemands et autrichiens ont fabriqué une monnaie composée de matériaux choisis ne laissant entrevoir aucune crise: billets de banque en tissu, bois, jetons de monnaie en terre cuite émaillée ou en porcelaine rehaussée d’or fin sont étonnants exemples. Les implications «collecteur» de ces objets, confirmées par leur fragilité, sont évidentes, tout autant qu’elles dépeignent une industrie déjà en pleine reprise.

Paris Monnaie
Fondée en 864, la Monnaie de Paris est la plus ancienne institution de France et la plus ancienne entreprise du monde. Il remplit la mission de service public de frappe des pièces en euros en circulation pour la France, ainsi que des pièces pour d’autres monnaies étrangères. Pendant douze siècles, il a cultivé une tradition vénérable des arts et métiers du travail des métaux. Premier établissement industriel parisien, il est le dernier en activité aujourd’hui. Des œuvres artistiques sont toujours produites dans son usine historique Quai de Conti.
Attaché au ministère français de l’Economie, des Finances et de l’Industrie depuis 1796, la Monnaie de Paris est devenue en janvier 2007 un Etablissement public industriel et commercial (EPIC).