Renoir. Des collections du Musée d’Orsay et de l’Orangerie, Galerie civique d’art moderne et contemporain de Turin

La Ville de Turin, la GAM – Galerie Civique d’Art Moderne et Contemporain de Turin et l’éditeur Skira présentent une splendide exposition dédiée au grand artiste français, avec des chefs-d’œuvre des collections du Musée d’Orsay et du Musée de l’Orangerie à Paris.

La collaboration fortement souhaitée par le maire, Piero Fassino, se poursuit entre la ville de Turin, le musée d’Orsay et l’éditeur Skira, qui a débuté en 2012 avec la grande exposition consacrée à Degas.

La Galerie Civique d’Art Moderne et Contemporain de Turin présente une extraordinaire nouvelle exposition consacrée à Pierre-Auguste Renoir (1841-1919), artiste parmi les protagonistes, avec Manet, Monet, Degas, Pissarro, Sisley, Cézanne, entre les années soixante-dix du XIX siècle et les vingt premières années du XXe siècle, de la grande saison de l’impressionnisme français. Un accord important signé entre le GAM – Galerie civique d’art moderne et contemporain de Turin – Fondation Torino Musei, éditeur Skira et le Musée d’Orsay à Paris – avec Danilo Eccher, directeur du GAM, Massimo Vitta Zelman, président de Skira, et Guy Cogeval, président du musée d’Orsay et de l’Orangerie – a permis de définir un projet scientifique de grande valeur, qui apporte à la capitale piémontaise une splendide exposition,

Le Musée d’Orsay et le Musée de l’Orangerie, qui conservent la collection la plus complète au monde de l’oeuvre de Renoir, ont convenu de se priver de soixante chefs-d’œuvre pendant quatre mois, pour donner vie à une exposition extraordinaire qui documente l’ensemble des activités de ce grand peintre, témoin des moments les plus marquants et des tournants qui, dès le début, ont conduit l’artiste à la fin de sa carrière vers un départ progressif de l’impressionnisme.

La curation de l’exposition est confiée à Sylvie Patry, conservatrice en chef du musée d’Orsay et grande spécialiste de Renoir, et Riccardo Passoni, directeur adjoint du GAM de Turin. Skira, en étroite collaboration avec la Fondation des musées de Turin, réalise l’exposition en prenant en charge les aspects organisationnels et promotionnels et publie son catalogue.

L’exposition sera mise en place au premier étage du GAM, dans la salle de l’Exposition, dans le sillage des collections permanentes, récemment réaménagées selon quatre nouveaux itinéraires thématiques. Du point de vue de l’exposition également, l’exposition aura donc le souffle, la facilité et l’agrément d’une grande exposition internationale. Une œuvre appartenant à GAM sera également exposée: le Portrait de son fils Pierre (1885), acheté dans l’intérêt de Lionello Venturi. Cette exposition vise à couvrir l’évolution complexe de la carrière artistique de Renoir – active depuis plus de cinquante ans afin de produire plus de cinq mille tableaux et un très grand nombre de dessins et aquarelles -, mettant en évidence la grande variété et qualité de sa technique de peinture et les différents sujets traités.

Au cours de sa vie, Renoir se mesure en expérimentant la peinture en plein air, aux côtés de son ami et collègue Monet, tout en complétant des travaux en atelier. Se consacrant également au portrait sur commande, il est entouré d’un cercle restreint d’admirateurs et de mécènes. Comme preuve du succès déjà atteint dans la vie, il suffit de penser au fait que pour sa peinture Madame Charpentier et ses enfants (achetés par le Metropolitan Museum of Art de New York en 1907), le prix le plus élevé payé au cours de ces années par une peinture a été payé . Il est un ami personnel des impressionnistes – tels que Monet, Cézanne, Pissarro, Berthe Morisot, Sisley et Caillebotte, avec qui il discute de peinture et organise des expositions – et encourage d’autres grands artistes tels que Matisse, Bonnard, Maurice Denis.

Pierre-Auguste Renoir
Pierre-Auguste Renoir, plus connu sous le nom d’Auguste Renoir (25 février 1841 – 3 décembre 1919), était un artiste français qui fut un peintre de premier plan dans le développement du style impressionniste. Célébriste de la beauté et surtout de la sensualité féminine, il a été dit que « Renoir est le dernier représentant d’une tradition qui va directement de Rubens à Watteau ».

Il était le père de l’acteur Pierre Renoir (1885-1952), du cinéaste Jean Renoir (1894-1979) et du céramiste Claude Renoir (1901-1969). Il était le grand-père du cinéaste Claude Renoir (1913–1993), fils de Pierre.

Style

Peintre
Renoir était l’un des interprètes les plus convaincus et les plus spontanés du mouvement impressionniste. Artiste prodigieusement prolifique, avec jusqu’à cinq mille toiles et autant de dessins et d’aquarelles, Renoir s’est également distingué pour sa polyvalence, à tel point que l’on peut distinguer de nombreuses périodes dans sa production picturale. C’est Renoir lui-même, en tout cas, qui parle de sa façon de faire de l’art:

«J’arrange mon sujet comme je veux, puis je commence à le peindre comme le ferait un enfant. Je veux que le rouge soit fort et sonne comme une cloche, quand je ne peux pas, j’ajoute d’autres rouges et d’autres couleurs jusqu’à ce que je l’obtienne. Il n’y a pas d’autre méchanceté. Je n’ai pas de règles ou de méthodes; n’importe qui peut examiner ce que j’utilise ou voir comment je peins, et ils verront que je n’ai pas de secrets. Je regarde un nu et vois des myriades de petites teintes. J’ai besoin de savoir ce qui fait vibrer la chair sur la toile. Aujourd’hui, nous voulons tout expliquer. Mais si une peinture pouvait s’expliquer, ce ne serait plus de l’art. Voulez-vous que je vous dise quelles sont les deux qualités de l’art pour moi? Elle doit être indescriptible et inimitable … L’œuvre d’art doit vous saisir, vous envelopper, vous transporter »
(Pierre-Auguste Renoir)

Comme il ressort de cette citation, Renoir se lie à la peinture d’une manière absolument anti-intellectualiste et, bien qu’il soit lui aussi intolérant aux conventionnalisations académiques, il n’a jamais contribué à la cause de l’impressionnisme par des réflexions théoriques ou des déclarations abstraites. En fait, il répudie toutes les formes d’intellectualisme et avoue une vive confiance dans l’expérience concrète de la création picturale, qui s’oppose au seul moyen d’expression des pinceaux et des palettes: « travailler comme un bon travailleur », « travailleur de la peinture », «faire de la bonne peinture» sont en fait des phrases qui reviennent souvent dans sa correspondance. Cette demande décisive de concrétisme est réitérée par Renoir lui-même dans sa préface à l’édition française du Livre d’Art de Cennino Cennini (1911), où, en plus de fournir des conseils pratiques et des suggestions aux aspirants peintres, il affirme que «il peut sembler que nous sommes très loin de Cennino Cennini et de la peinture, mais ce n’est pas le cas, car la peinture est un métier comme la menuiserie et le travail du fer, et est soumis aux mêmes règles ». Le critique Octave Mirbeau pointe même les causes de la grandeur de Renoir précisément dans cette conception particulière de la peinture:

« Alors que les théories, les doctrines, l’esthétique, la métaphysique et les physiologies de l’art se succèdent, le travail de Renoir se développe d’année en année, de mois en mois, de jour en jour avec la simplicité d’une fleur épanouie, d’un fruit qui mûrit Renoir a vécu et peint . Il a fait son travail, et c’est là que réside tout son génie. C’est pourquoi toute sa vie et son travail sont une leçon de bonheur  »
(Octave Mirbeau)

Sculpteur
De 1913 à 1918, en collaboration avec Richard Guino, jeune sculpteur d’origine catalane que lui présentent Aristide Maillol et Ambroise Vollard, il crée un ensemble de pièces majeures: Vénus Victrix, le Jugement de Pâris, la Grande Laveuse, le Forgeron.

L’attribution de ces œuvres collaboratives a été révisée soixante ans après leur création, après un long procès initié en 1965 par Michel Guino, fils de Richard et sculpteur lui-même, qui a œuvré pour faire connaître l’œuvre de son père. Après une analyse minutieuse des pièces, les processus qui ont présidé à leur création et l’audition de nombreux artistes, la qualité de co-auteur a été reconnue par Richard Guino en 1971 par la troisième chambre civile du tribunal de Paris et définitivement établie par la Cour de cassation en 1973. L’historien de l’art Paul Haesaerts précise à partir de 1947 dans Renoir sculpteur: «Guino n’a jamais été simplement un acteur lisant un texte ou un musicien interprétant mécaniquement une partition. Guino était impliqué corps et âme dans l’acte créatif. On peut même dire avec certitude que s’il n’y avait pas été, les sculptures de Renoir n’auraient pas vu le jour. Guino était essentiel « .

Le procès du fils de Guino n’a pas été intenté « contre » Renoir, une réduction véhiculée dans certains textes ou articles de journaux faisant référence à « l’affaire ». Il s’agissait de contribuer à révéler l’histoire exceptionnelle de ce processus créatif pour restituer la contribution originale de Guino à l’œuvre sculptée, à l’origine obscurcie par Vollard. Un sculpteur « praticien » reproduit ou agrandit un modèle déjà existant. Guino, pour sa part, transpose les techniques: on passe de la peinture de Renoir à la sculpture de Guino, l’esprit de la peinture se reflète dans l’esprit de la sculpture. Transmutation éprouvée entre deux artistes. Le phénomène a pu être accompli grâce à leur amitié et à leur intense communauté de vues. Le peintre avec ses toiles et le sculpteur travaillant l’argile des Collettes. CONTRE’

Après avoir interrompu sa collaboration avec Guino, il travaille avec le sculpteur Louis Morel (1887-1975), originaire d’Essoyes. Ensemble, ils fabriquent la terre cuite, deux danseurs et un joueur de flûte.

Influences
Pour les raisons susmentionnées, Renoir n’a jamais été animé par l’idéalisme avide d’un Monet ou d’un Cézanne et, au contraire, il a souvent recouru à l’exemple des maîtres anciens. Par rapport à ses collègues, Renoir se sentait « héritier d’une force vivante accumulée au fil des générations » (Benedetti) et c’est pour cette raison qu’il était plus disposé à s’inspirer de l’héritage du passé. En fait, même au lycée, il n’a jamais cessé de considérer le musée comme le lieu propice à la formation d’un artiste, reconnaissant sa capacité à enseigner « ce goût de la peinture que seule la nature ne peut nous donner ».

L’œuvre de Renoir sert de point de rencontre (ou de choc) entre des expériences artistiques très hétérogènes. Di Rubens était très attiré par la vigueur et le corps du coup de pinceau et le rendu magistral des teints très expressifs, tandis que les peintres rococo français – Fragonard et Boucher tout d’abord – appréciaient beaucoup la délicatesse et le parfum de la matière chromatique. Un rôle décisif dans la réflexion artistique de Renoir est également joué par les peintres de Barbizon, à qui il a emprunté le goût du plein air et l’habitude d’évaluer les correspondances entre paysages et humeurs. L’influence de Jean-Auguste-Dominique Ingres était également importante, une authentique « bête noire » pour ses collègues, qui y voyaient un symbole de la stérilité des pratiques académiques: au contraire, Renoir était très fasciné par son style, dans lequel il croyait percevoir le rythme de la vie, et il y tirait un plaisir presque charnel (« J’appréciais secrètement le beau ventre de la Source et le cou et les bras de Madame Rivière »). Par Raffaello Sanzio, une influence très importante surtout en fin de maturité, nous parlerons dans le paragraphe Le style aigre.

Dans l’univers artistique de Renoir, Gustave Courbet occupe donc une place de choix. Homme animé d’une forte détermination et d’un charisme combatif, Courbet a non seulement thématisé ce qui jusque-là était considéré comme indigne de représentation picturale, mais il a également réussi à transférer des morceaux de matière sur la toile. C’est une peinture lourde, lourde, avec une force tout-terre: les toiles du maître d’Ornans, en fait, ont leur propre physique puissante, et elles sont constituées d’un matériau pictural très brut dans lequel les couleurs sont riches en épaisseur et sont souvent appliqués avec des coups de spatule, précisément pour obtenir des effets « concrets » sur la toile. Cette vigueur expressive suggère à Renoir une liberté inconnue dans le traitement du matériau pictural, qui émergera clairement même lorsque l’artiste  »

Le peintre de la joie de vivre
Le travail de Renoir est basé sur la joie de vivre la plus authentique. Dans sa vie, en effet, Renoir a été animé par un véritable enthousiasme pour la vie, et il n’a jamais cessé de s’étonner devant les merveilles infinies de la création, appréciant pleinement sa beauté et ressentant le désir spasmodique de transférer sur la toile, avec un participation émotionnelle douce et intense, le souvenir de chaque perception visuelle l’avait frappé. Pour souligner la relation de Renoir avec tous les aspects de la vie, grands ou petits, le critique Piero Adorno a proposé le syllogisme suivant: «tout ce qui existe vit, tout ce qui vit est beau, tout ce qui est beau mérite d’être peint» ( tout ce qui existe est donc digne de représentation picturale).

Toutes ses peintures, des premières œuvres de l’atelier de Gleyre aux dernières œuvres de Cagnes, capturent en réalité les aspects les plus doux et les plus éphémères de la vie, les réalisant avec des coups de pinceau fluides et vibrants et avec une texture chromatique et lumineuse apaisante et joyeuse. «J’aime ces tableaux qui me donnent envie d’aller à l’intérieur pour faire un tour»: avec ces mots, le peintre invite explicitement les observateurs de ses tableaux à interagir avec eux avec plaisir à l’image de ce qu’il a lui-même vécu. Celui de « fun » est l’un des concepts clés de la poétique de Renoir: en fait, il aimait « mettre des couleurs sur la toile pour s’amuser », au point qu’aucun autre peintre n’avait jamais ressenti une telle urgence inaliénable à peindre pour exprimer ses sentiments («le pinceau [… Une réponse exemplaire qu’il a donnée avec une sincérité juvénile au maître Gleyre, qui a conçu la peinture comme un exercice formel rigoureux, à réaliser avec sérieux et responsabilité et sans lâcher prise sur les figures occasionnelles. Au maître étonné, qui l’a déchiré en lui rappelant les dangers de « peindre pour le plaisir », il aurait en fait répondu: « Si je ne m’amuse pas, croyez bien que je ne peindrais pas du tout ».

En résumé, même ses tableaux témoignent de sa gaieté débordante et de son accueil envers le monde perçu comme une pure expression de la joie de vivre. C’est aussi grâce à une série cohérente de dispositifs stylistiques importants: surtout avant le virage aigre, ses tableaux sont légers et moelleux, imprégnés d’une lumière vive et pulsante, et ils sont submergés par les couleurs avec une vivacité joyeuse. Renoir fragmente ensuite la lumière en petites taches de couleur, chacune étant déposée sur la toile avec une grande délicatesse de toucher, à tel point que toute l’œuvre semble vibrer aux yeux du spectateur, et devenir quelque chose de clair et de tangible, grâce aussi aux sages accords entre couleurs complémentaires (distribués selon une technique proprement impressionniste).

Cette effervescence créative s’adresse à de nombreux genres picturaux. Son travail se réfère principalement à «l’héroïsme de la vie moderne» que Charles Baudelaire avait identifié comme le thème d’un art qui peut être dit authentique: pour cette raison, Renoir – ainsi que ses collègues – comprennent que pour obtenir d’excellents résultats dans la «peinture d’histoire» ne doit pas se réfugier hypocritement dans l’histoire des siècles passés, mais plutôt affronter l’ère contemporaine de manière spontanée, fraîche mais vigoureuse, à l’instar de l’ancien Édouard Manet. Voici le commentaire de Maria Teresa Benedetti, significatif également pour une meilleure compréhension de la relation entre Renoir et la joie de vivre:

« En ces années [celles de l’expérience impressionniste, ndlr]. Son ressenti est marqué par le réalisme domestique de sa génération, le sujet d’une peinture est toujours ludique: thèmes romantiques qui proposent des amoureux à une danse ou au jardin, scènes de genre illustrant d’agréables rencontres au Moulin de la Galette, à Bougival, à Chatou font de ces œuvres des chefs-d’œuvre descriptifs, adorables et populaires; en eux la peinture de l’amour coïncide avec l’amour de la peinture et personne comme Renoir ne peut chanter un Paris aussi industriel la civilisation est sur le point de détruire »
(Maria Teresa Benedetti)

Le style aigre
Un changement stylistique drastique s’est produit après le voyage en Italie en 1881. Se sentant opprimé par le choix impressionniste, Renoir décide en effet cette année-là de se rendre au Bel Paese pour étudier attentivement l’art des maîtres de la Renaissance, sur les traces d’une image topos emprunté au vénéré Ingres. Le séjour italien, en effet, en plus d’élargir encore ses horizons figuratifs, a eu des conséquences importantes sur sa façon de faire de la peinture. Les fresques de Pompéi et, surtout, les fresques « admirables de simplicité et de grandeur » de la Farnesina de Raphaël, dans lesquelles il découvre cette perfection esthétique qu’il n’a pu atteindre avec l’expérience impressionniste qu’il n’a pu atteindre. Avec un enthousiasme mélancolique, elle avouait à son amie Marguerite Charpentier:

«Raphaël, qui n’a pas peint en extérieur, avait pourtant étudié la lumière du soleil, car ses fresques en sont remplies. D’un autre côté, à force de regarder à l’extérieur, j’ai fini par ne plus voir les grandes harmonies, en me souciant trop des petits détails qui obscurcissent le soleil au lieu de le rehausser »
(Pierre-Auguste Renoir)

Si l’art de Raphaël a fasciné Renoir pour sa taille silencieuse, pour la lumière diffuse et pour les volumes définis de manière plastique, il a dérivé du goût des peintures pompéiennes ces scènes qui mélangent savamment la dimension idéale avec la vraie, comme cela se produit dans les fresques représentant des sociétés héraldiques. , une architecture mythologique, amoureuse et dionysiaque et illusionniste qui a embelli la domus de la ville vésuve. Il le dit lui-même:

«Les peintures pompéiennes sont très intéressantes à tous points de vue; donc je reste au soleil, pas tant pour faire des portraits en plein soleil, mais parce que, en m’échauffant et en observant intensément, je vais acquérir, je crois, la grandeur et la simplicité des peintres anciens »
(Pierre-Auguste Renoir)

A la vue des modèles de la Renaissance, Renoir éprouva un fort malaise spirituel, il se vit dépouillé de ses certitudes, pire encore, il se découvrit artistiquement ignorant. Suite à la réception des fresques et des peintures pompéiennes de Raphaël, il était en effet convaincu qu’il n’avait jamais vraiment possédé la technique picturale et graphique, et qu’il avait désormais épuisé les ressources offertes par la technique impressionniste, notamment en ce qui concerne l’incidence de la lumière sur la nature: « J’avais atteint le point extrême de l’impressionnisme et je devais découvrir que je ne savais plus peindre ni dessiner », aurait-il tristement observé en 1883.

Pour résoudre cette impasse, Renoir se détache de l’impressionnisme et inaugure sa phase « aigre » ou « ingresque ». En réconciliant le modèle Raphaelesque avec le modèle Ingresian, connu et aimé depuis sa création, Renoir décide de surmonter cette instabilité vibrante de la perception visuelle d’une matrice impressionniste et d’arriver à une peinture plus solide et incisive. Pour souligner la constructivité des formes, notamment, il a retrouvé un design clair et précis, un « goût attentif aux volumes, à la solidité des contours, à la monumentalité des images, à une chasteté progressive des couleurs » (StileArte ), sous le signe d’une synthèse moins épisodique et plus systématique du matériau pictural.

Il abandonne également le plein air et revient élaborer ses créations en salle, mais cette fois aidé par un riche fond figuratif. Pour le même processus dans son travail, les paysages sont de plus en plus vus de façon sporadique et un goût pour les figures humaines se développe, en particulier les nus féminins. Il s’agit d’une véritable constante iconographique dans son œuvre – présente à la fois au début et lors des expériences impressionnistes – mais qui s’affirme au cours de la phase aigre avec plus de vigueur, sous le signe d’une primauté absolue de la figure, rendue à coups de pinceaux vifs et délicats. , capable de capturer avec précision l’humeur joyeuse du sujet et l’opulence de son teint.

Oeuvres
Les peintures de Renoir se distinguent par leur lumière vibrante et leur couleur saturée, se concentrant le plus souvent sur des personnes dans des compositions intimes et candides. Le nu féminin était l’un de ses principaux sujets. Cependant, en 1876, un critique du Figaro a écrit « Essayez d’expliquer à Monsieur Renoir que le torse d’une femme n’est pas une masse de chair en décomposition avec ces taches vert violacé qui dénotent un état de putréfaction complète dans un cadavre » Pourtant dans un style impressionniste caractéristique , Renoir a suggéré les détails d’une scène à travers des touches de couleurs librement brossées, afin que ses figures fusionnent doucement entre elles et avec leur environnement.

Ses premières peintures montrent l’influence du colorisme d’Eugène Delacroix et de la luminosité de Camille Corot. Il admire également le réalisme de Gustave Courbet et d’Édouard Manet, et ses premiers travaux ressemblent aux leurs dans son utilisation du noir comme couleur. Renoir admirait le sens du mouvement d’Edgar Degas. Les autres peintres que Renoir admirait beaucoup étaient les maîtres du XVIIIe siècle François Boucher et Jean-Honoré Fragonard.

Un bel exemple des premiers travaux de Renoir et des preuves de l’influence du réalisme de Courbet est Diana, 1867. Apparemment un sujet mythologique, la peinture est un travail naturaliste d’atelier; la figure soigneusement observée, solidement modelée et superposée à un paysage artificiel. Si l’œuvre est une pièce «étudiante», Renoir a une réponse personnelle accrue à la sensualité féminine. Le modèle était Lise Tréhot, la maîtresse de l’artiste à l’époque, et l’inspiration pour un certain nombre de peintures.

À la fin des années 1860, grâce à la pratique de la peinture de la lumière et de l’eau en plein air (à l’extérieur), lui et son ami Claude Monet ont découvert que la couleur des ombres n’est pas brune ou noire, mais la couleur réfléchie des objets qui les entourent, un effet connu aujourd’hui sous le nom de réflexion diffuse. Il existe plusieurs paires de tableaux dans lesquels Renoir et Monet ont travaillé côte à côte, représentant les mêmes scènes (La Grenouillère, 1869).

L’une des œuvres impressionnistes les plus connues est la danse de Renoir de 1876 au Moulin de la Galette (Bal du moulin de la Galette). La peinture représente une scène en plein air, bondée de gens dans un jardin de danse populaire sur la Butte Montmartre près de chez lui. Les œuvres de sa première maturité étaient typiquement des instantanés impressionnistes de la vie réelle, pleins de couleurs étincelantes et de lumière. Au milieu des années 1880, cependant, il avait rompu avec le mouvement d’appliquer une technique formelle plus disciplinée aux portraits et aux peintures de figures, en particulier des femmes. C’était un voyage en Italie en 1881 quand il a vu des œuvres de Raphaël et d’autres maîtres de la Renaissance, qui l’ont convaincu qu’il était sur la mauvaise voie, et pour les prochaines années, il a peint dans un style plus sévère pour tenter de revenir au classicisme . Se concentrer sur son dessin et mettre en valeur les contours des figures,

Après 1890, il change à nouveau de direction. Pour dissoudre les contours, comme dans ses travaux antérieurs, il est revenu à une couleur finement brossée. À partir de cette période, il se concentre sur les nus monumentaux et les scènes domestiques, dont de beaux exemples sont Girls at the Piano, 1892 et Grandes Baigneuses, 1887. Ce dernier tableau est le plus typique et le plus réussi des nus tardifs et abondamment charnus de Renoir.

Artiste prolifique, il a créé plusieurs milliers de tableaux. La sensualité chaleureuse du style de Renoir fait de ses peintures certaines des œuvres les plus connues et les plus fréquemment reproduites de l’histoire de l’art. La plus grande collection unique de ses œuvres – 181 peintures en tout – se trouve à la Barnes Foundation, à Philadelphie.

L’exposition
L’exposition de Turin est divisée en neuf sections. L’âge de La Bohème Après son admission à l’Ecole des Beaux-Arts en 1862, Renoir rencontre et fréquente Alfred Sisley, Frédéric Bazille et Claude Monet, avec qui il partage principalement des séances de peinture en plein air à Fontainebleau ou Grenouillère aux environs de Paris. Certains de ses portraits de connaissances et d’amis sont de cette période: William Sisley (1864), Frédéric Bazille (1867), Claude Monet (1875), exposés dans cette section avec deux œuvres de Bazille lui-même, son atelier (1870) et un portrait par Renoir lui-même (1867), et un par Monet, un paysage d’hiver de Honfleur (vers 1867). Voici également deux des premiers nus de Renoir, parmi les thèmes les plus chers à l’artiste, Le garçon au chat (1868) et Femme demi-nue couchée: la rose (vers 1872).

« Nous adorons les femmes de Renoir » (Proust)
Vous entrez au cœur de l’exposition avec une galerie de magnifiques portraits de femmes, où il est vraiment difficile de choisir entre Madame Darras (vers 1868), La liseuse (1874-1876), Jeune femme au voile (C. 1870), Madame Georges Charpentier (1876-1877), Femme au jabot blanc (1880), Jeune femme assise (1909), jusqu’au portrait de Colonne romaine (1913). Renoir choisit ses protagonistes de tous les milieux sociaux: bourgeois, ouvriers, danseurs, tous habillés d’une grâce particulière et d’une beauté impalpable qui évoquent les modèles féminins de l’art du XVIIIe siècle. On peut dire que Renoir a inventé la femme du XIXe siècle, à tel point que Proust a écrit: « Des femmes passent dans la rue, ce sont des Renoir ».

«Le métier de paysagiste» (Renoir)
La collection d’œuvres paysagères de Renoir du musée d’Orsay est probablement la plus belle du monde. Cette section en présente dix, qui retracent une longue période chronologique, dont le voyage à Alger réalisé par l’artiste en 1881. Par rapport à ce séjour nord-africain, on retrouve à l’affiche: le champ de bananes, le paysage algérien et la mosquée, où Renoir peint le soleil – des palmiers baisés, des jardins privés et des jardins aux saveurs exotiques.

Les autres tableaux représentent des vues splendides où la grande attraction du maître est perçue pour l’eau, la verdure et les jardins, une source continue d’inspiration, pour la croissance pérenne des plantes et ce qui définit leur « irrégularité » intrinsèque, qu’il considère comme sacro-sainte par rapport à la nature. apprivoisé par l’homme: Péniches sur la Seine (1869), La Poire d’Angleterre (vers 1870), La Seine à Argenteuil (1873), Le chemin dans les hautes herbes (1876-1877), La Seine à Champrosay (1876), La pont de chemin de fer à Chatou (1881) jusqu’à Paesaggio a Cagnes (vers 1915), peint par le célèbre domaine « Les Collettes » sur la Côte d’Azur, où Renoir s’est réfugié à la fin de sa vie pour trouver un climat doux qui le guérirait de la grave pathologie rhumatoïde qui l’affligeait.  »

Enfance
Les enfants, souvent ses enfants ou ceux d’amis, sont très présents dans l’œuvre de Renoir. Ces neuf œuvres exposées rivalisent avec les portraits de femmes en nous donnant des instantanés de visages enfantins pleins de poésie: du beau pastel sur papier Portrait d’une jeune fille brune assise, mains croisées (1879), au tableau Fernand Halphen enfant (1880) dans un portrait sérieux habillé en marin, de la délicieuse Julie Manet (1887) à une tendre Maternité (1885), du Portrait du fils Pierre (1885), comme il était dit de la collection GAM, à un autre délicat pastel Portrait de petite fille coiffée d’une charlotte (Vers 1900), au célèbre Il clown (Portrait de Coco) (1909), dont Claude lui-même, le fils dépeint, se souviendra de la genèse tourmentée,

La «recherche heureuse du côté moderne» (Zola)
On retrouve ici cinq œuvres dédiées à un échantillon de la société moderne et aux nouveaux divertissements des Parisiens, de la danse aux excursions à la campagne: La balançoire (1876) ou la balançoire, où les magnifiques figures de la femme, du jardinier et la petite fille à côté de la balançoire se détache dans un jardin aux couleurs vives. Les touches de couleur diffusées par de petites taches font l’effet de la lumière du soleil filtrée à travers les feuilles, créant une atmosphère de vibration chromatique et lumineuse, ce qui en fait l’une des expressions maximales de la peinture impressionniste en plein air. A partir de ce chef-d’œuvre, le grand écrivain Emile Zola – qui a rencontré Renoir dans le salon de Madame Charpentier, épouse de son éditeur – s’est inspiré d’une pièce du roman Une page d’amour, installée dans un jardin de printemps. Alphonsine Fournaise (1879) est un autre portrait féminin enchanteur, tandis que les célèbres Ballo in Campagna et Ballo in Città (1883) représentent admirablement deux couples dans les moments insouciants de leur temps libre. Le Jeunes filles au piano
La célèbre Jeunes filles au piano (1892) est le premier tableau de Renoir à entrer dans les collections d’un musée français. À côté, une autre magnifique toile: Yvonne et Christine Lerolle au piano (vers 1897-1898) et deux sujets liés à la musique: le célèbre portrait de Richard Wagner, représenté à Palerme lors d’une rencontre mémorable entre Renoir et le compositeur allemand, et celui de Théodore de Banville (tous deux de 1882).

«Magnifique comme une rangée de fleurs» (Renoir)
Petite section d’œuvres extraordinaires: les bouquets de Renoir sont maîtres dans la technique et les couleurs, c’est l’un des thèmes où l’artiste expérimente le plus. «Quand je peins des fleurs – a-t-il déclaré – j’expérimente hardiment les nuances et les valeurs sans me soucier de ruiner toute la toile; Je n’oserais pas en faire autant avec une figurine. « La variété des nuances dans les couleurs est vraiment impressionnante: Renoir joue avec la palette, avec des touches douces et délicates, évoquant les senteurs des fleurs qui à leur tour renvoient aux sensations et aux souvenirs.

«Une forme essentielle de dell’arte» (Renoir)
Il s’agit d’une section capitale de l’exposition, avec des œuvres fondamentales dans la carrière de Renoir, qui a toujours montré un profond intérêt pour l’art de la Renaissance italienne, admirant les œuvres de Raphaël, Titien et le baroque nordique de Rubens, dont il assimile le doux et le langoureux. formes et un chromatisme complet, qui font partie de son code stylistique concernant la façon de traiter la figure féminine. «Je regarde un nu et je vois des myriades de petites teintes. J’ai besoin de savoir ce qui fera vivre et vibrer la chair sur la toile « – a déclaré le peintre. A l’affiche, cinq tableaux spectaculaires, tous peints dans la dernière période de sa vie, entre 1906 et 1917: Femme nue couchée (Gabrielle) (1906), Grand nu (1907), La toilette (Femme peignant ses cheveux) (1907-1908), Femme nue vue de derrière (1909), Odalisque dormante (1915-1917). Et une imposante sculpture en bronze,

L’héritage des baigneurs La «fermeture» de l’exposition est dédiée
au dernier chef-d’œuvre fondamental de Renoir, The Bathers (1918-1919). La peinture est emblématique des recherches menées par l’artiste à la fin de sa vie. Ici, il célèbre une nature intemporelle, d’où toute référence au contemporain est interdite. Les baigneurs doivent être considérés comme le testament pictural de Renoir. C’est dans cet esprit que ses trois enfants ont fait don du tableau à l’Etat français en 1923. Les deux modèles se trouvant au premier plan et les trois baigneurs sur fond de composition posés dans le grand jardin d’oliviers des Collettes, le domaine du peintre à Cagnes-sur-Mer dans le sud de la France. Le paysage méditerranéen renvoie à la tradition classique italienne et grecque, quand « la Terre était le paradis des dieux ». « Voici ce que je veux peindre, » dit Renoir. Cette vision idyllique est soulignée par la sensualité des modèles, par la richesse des couleurs et la plénitude des formes. Ces figures doivent également beaucoup aux nus de Titien et Rubens, très admirés par Renoir. Ils véhiculent un plaisir de peindre que la maladie et la souffrance du peintre à la fin de sa vie n’ont pas vaincues.

Les outils de travail de l’artiste sont également exposés: palette, boîte de couleur, pinceaux, outils inséparables du grand maître. Jusqu’à la dernière fois, il avait travaillé sur ses baigneurs, ayant ses pinceaux attachés à ses doigts maintenant déformés par la polyarthrite rhumatoïde. Renoir est décédé le 3 décembre 1919, tué d’une infection pulmonaire; le soir avant de mourir, il prononce ces mots: « Peut-être que maintenant je commence à comprendre quelque chose ». Après moins de deux mois, Modigliani décède également, que Renoir a souvent reçu dans son atelier. Le monde de l’art perd ainsi deux interprètes extraordinaires.

L’exposition est accompagnée d’une publication publiée par Skira qui présente, en plus des reproductions des œuvres exposées, plusieurs contributions critiques. En particulier, Sylvie Patry explore la manière dont les institutions muséales françaises ont accepté et acquis l’œuvre de Renoir au fil du temps. La contribution de Riccardo Passoni est plutôt consacrée à la présence de Renoir à la Biennale de Venise de 1910 – où trente-sept de ses œuvres ont été exposées – et à l’influence que cette participation a eu sur certains grands artistes italiens tels que Boccioni, Carrà, Soffici, Morandi et De Chirico, qui autour de 1930 stylistiquement lié à la poésie du grand maître français.

Un autre texte, édité par Augustin De Butler, vise plutôt à retracer l’intérêt de l’artiste pour l’art italien lors de son voyage dans notre pays, avec une référence particulière à son séjour à Venise en 1881. Représentant la beauté, surprenant par la lumière et la couleur, dépeignant la vie de sa propre époque avec un réalisme délicat, sont des éléments clés de la philosophie picturale de Renoir, qui en font toujours l’un des peintres les plus appréciés du public. L’exposition de Turin se veut un hommage à son art et une occasion unique de retracer son histoire artistique et humaine, et vous permet d’admirer des œuvres extraordinaires, dont la plupart n’ont jamais été exposées en Italie.

Galerie civique d’art moderne et contemporain de Turin
La galerie civique d’art moderne et contemporain de Turin est située via Magenta 31 à Turin, en Italie. Elle a été fondée vers 1891 – 95. Elle abrite les collections artistiques permanentes des XIXe et XXe siècles. Il fait partie de la Fondation Torino Musei, qui comprend également le MAO (Musée d’art oriental), le Palazzo Madama et Casaforte degli Acaja (Musée civique d’art ancien), le village médiéval et la forteresse.

GAM – la galerie civique des arts modernes et contemporains – est le plus ancien musée d’art moderne d’Italie. Depuis son ouverture au public en 1863, de nombreux chefs-d’œuvre ont été ajoutés à ses collections au fil du temps. À l’heure actuelle, les collections de GAM comprennent plus de 47000 œuvres, allant des peintures et sculptures aux installations et à l’art photographique, ainsi qu’une riche collection de dessins et gravures, et l’une des plus grandes collections de films et de vidéos d’artistes en Europe.

Fort de cet héritage, GAM continue de mettre en œuvre son engagement initial envers la recherche contemporaine en reliant constamment ses œuvres historiques au débat culturel d’aujourd’hui et en veillant à ce que le programme d’exposition soit étroitement lié aux collections. Les œuvres des collections sont exposées dans des groupes thématiques qui changent au fil du temps, garantissant que les visiteurs voient toujours les collections sous un nouvel angle et peuvent faire une nouvelle analyse des chefs-d’œuvre de la Galerie.

Les œuvres des plus grands artistes italiens du XIXe siècle, comme Fontanesi, Fattori, Pellizza da Volpedo et Medardo Rosso, et des maîtres du XXe siècle, dont Morandi, Casorati, Martini et De Pisis, ont retrouvé leur capacité à parler au présent, et de montrer toute leur complexité au même titre que les œuvres des avant-gardes historiques internationales, dont des exemplaires exceptionnels sont également dans la collection: de Max Ernst à Paul Klee et Picabia, ainsi que des œuvres de la nouvelle avant-guerre d’après-guerre mouvements de garde, avec l’une des plus grandes collections d’Arte Povera – y compris des œuvres de Paolini, Boetti, Anselmo, Zorio, Penone et Pistoletto – mais aussi la production artistique actuelle à laquelle GAM consacre un vaste espace d’exposition.