Visite guidée de la Manufacture des Gobelins, Paris, France

La Manufacture des Gobelins est une usine de tapisserie historique à Paris, France. Il est situé au 42 avenue des Gobelins, près de la station de métro Les Gobelins dans le 13e arrondissement de Paris. Il est surtout connu comme une usine royale approvisionnant la cour des monarques français depuis Louis XIV, et il est maintenant géré par l’Administration générale du Mobilier national et des Manufactures nationales de tapis et tapisseries du ministère français de la Culture.

Il a été initialement établi sur le site en tant qu’entreprise de teinturerie médiévale par la famille Gobelin. Reconnaissable grâce aux bas-reliefs de sa façade représentant des tisserands, la Manufacture des Gobelins produit depuis plus de quatre siècles des tapisseries pour les palais français. Créé en 1601 sous le règne du roi Henri IV lors de l’essor de la tapisserie flamande. La Manufacture Nationale des Gobelins, ainsi que les terroirs correspondants, sont classés monuments historiques par arrêté du 24 mars 1993.

Les manufactures des Gobelins, de Beauvais et de la Savonnerie sont trois hauts lieux de la tapisserie et des tapis en France auxquels sont rattachés l’atelier de Lodève (tapis) et les ateliers du Puy (dentelle aux fuseaux) et d’Alençon (dentelle à l’aiguille). Les priorités sont l’ameublement des bâtiments domaniaux et la perpétuation d’une tradition, avec la conservation des techniques anciennes et le maintien d’une qualité traditionnelle appliquée aux expressions artistiques contemporaines.

La Galerie des Gobelins est dédiée aux expositions temporaires de tapisseries des manufactures françaises et de mobilier du Mobilier National, construit dans les jardins par Auguste Perret en 1937. La galerie, rénovée à partir de la fin des années 1970 afin de retrouver sa vocation première de un espace d’exposition, fête ses 400 ans lors de sa réouverture au public le 12 mai 2007.

Nom officiel « Manufacture nationale des Gobelins », l’usine est ouverte en visite guidée plusieurs après-midi par semaine sur rendez-vous. Géré par le Mobilier National et les Manufactures Nationales de Tapis et Tapisseries, qui regroupe le Mobilier National, la Manufacture de Tapisseries des Gobelins, la Manufacture de Beauvais (ateliers situés à Paris et Beauvais), la Manufacture de la Savonnerie (ateliers situés à Paris et Lodève) ainsi que la ateliers de dentelle à Alençon et au Puy.

Histoire
Les Gobelins étaient une famille de teinturiers qui, au milieu du XVe siècle, s’établit faubourg Saint-Marcel, à Paris, au bord de la Bièvre. La première mention d’un Gobelin date d’août 1443, lorsque Jehan Gobelin, probablement originaire de Reims d’une famille, loue une maison rue Mouffetard à l’enseigne du cygne et quatre ans plus tard s’établit sur les bords de la Bièvre, coulant à cette époque en plein air, un atelier de teinture.

Jehan Gobelin était un teinturier de laine réputé pour ses rouges écarlates au milieu du XVe siècle, installé près d’un moulin sur la Bièvre, dans le faubourg Saint-Marcel, ce moulin fut nommé « Moulin des Gobelins ». Alliée au Peultre et à la Canaye, elle continua pendant un siècle et demi à y perfectionner l’industrie de la teinturerie à tel point que la réputation des Gobelins éclipsa celle des autres teinturiers, et que la rivière comme le quartier prirent leur place.

17ème siècle
Dès les premières années du XVIIe siècle, le roi Henri IV met en place, sur les conseils de Sully, un ambitieux programme de développement des manufactures du royaume de France. Il s’agit alors de limiter au maximum l’achat à l’étranger des produits manufacturés, au premier titre des tapisseries et tapis, dont le souverain et la cour ont grand besoin.

Aussi, le « bon roi » installa au faubourg Saint-Marceau, dans des bâtiments loués aux descendants des teinturiers Gobelins, des ateliers de tapisserie tenus par deux Flamands, Marc de Comans et François de la Planche.

En 1662, les travaux du faubourg Saint Marcel, avec les terrains attenants, sont achetés par Jean-Baptiste Colbert pour le compte de Louis XIV et transformés en une manufacture générale de tapisserie, dans laquelle sont exécutés des dessins tant en tapisserie qu’en mobilier de toutes sortes. sous la direction du peintre de la cour, Charles Le Brun.

La Manufacture royale des Gobelins est née, et est soumise par lui à l’autorité du premier peintre du Roi, Charles Le Brun qui en fut le directeur et le dessinateur en chef de 1663 à 1690, eut par la suite des équipes entières d’artistes sous ses ordres,  » bons peintres, maîtres tapissiers en haute lisse, orfèvres, fondeurs, graveurs lapidaires et ébénistes… » Il regroupe alors la direction de la Manufacture des Meubles de la Couronne.

En 1665, l’atelier de teinture est officiellement organisé par Colbert ; la teinture est ensuite réalisée à l’aide de colorants naturels d’origine végétale (gaude, garance, indigo) ou animale (kermès, cochenille). La teinture des laines et des soies se fait désormais exclusivement avec des pigments synthétiques. La tapisserie de la Manufacture des Gobelins rivalisait avec la tapisserie de Beauvais.

La Manufacture des Gobelins reçoit son organisation définitive de l’édit royal de novembre 1667, avec des avantages significatifs accordés à ses habitants : défiscalisation, renonciation au droit d’augmentation, maintien d’apprentis choisis. Charles Le Brun y déploie jusqu’à sa mort le 12 février 1690, une activité prodigieuse, en installant les premiers ouvrages de haute lisse – 19 tentures (197 pièces) et 34 de basse lisse (286 pièces) – les ouvrages de la Manufacture, destinés pour l’ameublement des Maisons Royales et pour les cadeaux diplomatiques, ont acquis par leur magnificence une réputation internationale qui perdurera trois siècles plus tard. Divers successeurs tels que Pierre Mignard et Robert de Cotte poursuivent et développent la conception de Le Brun.

Parmi les tentures les plus célèbres, on peut citer Les Éléments, Les Saisons, L’Histoire d’Alexandre, L’Histoire du Roi, d’après Le Brun ; qui tisse aussi d’après Giulio Romano : L’Histoire de Constantin, d’après Raphaël Les Actes des Apôtres et Poussin avec L’Histoire de Moïse.

Sous la direction de Le Brun, la production de la manufacture, destinée à l’ameublement des Maisons Royales et aux cadeaux diplomatiques, acquiert par sa magnificence une renommée internationale. Ces trente années constituent l’âge d’or de la Manufacture, qui produit alors sept cent soixante-quinze pièces, dont cinq cent quarante-cinq rehaussées de fils d’or.

En raison des difficultés financières de Louis XIV, l’établissement est fermé en 1694, mais rouvert en 1697 pour la fabrication de tapisseries, principalement à usage royal. Seuls les artistes les plus habiles ont achevé leurs chefs-d’œuvre. Les ateliers rouvrent en janvier 1699, seules les tapisseries des Gobelins sont produites.

18ème siècle
Jules Hardouin-Mansart (1646-1708) relance l’établissement en en confiant la gestion (jusqu’en 1782) à plusieurs architectes contrôleurs des bâtiments du Roi. Le plus célèbre est Soufflot (1713-1780). Mais à partir du milieu du XVIIIe siècle, la Manufacture connaît de graves difficultés financières qui s’aggravent, le Trésor ne pouvant payer les commandes royales aux entrepreneurs, alors au bord de la faillite ; à cette crise financière s’ajoute une crise artistique, malgré la nomination de Jean-Baptiste Pierre, premier peintre du Roi.

Entre 1717 et 1794, L’Histoire de Don Quichotte d’après Charles-Antoine Coypel fut tissée à de nombreuses reprises. Les Environs correspondaient à une invention des Gobelins à la mode : un cadre très riche de fleurs et d’ornements, au centre duquel est placé un sujet historié.

La manufacture a également continué à tisser dans la tradition des grandes tentures d’inspiration religieuse, historique ou mythologique, comme L’Histoire d’Esther et L’Histoire de Jason selon Jean-François de Troy.

François Boucher, peintre préféré de Madame de Pompadour, fit tisser l’Aube et le Coucher du Soleil ainsi que la très célèbre Tenture des Dieux en 1763. Les tapisseries de portraits rencontrèrent également un certain succès, dont par exemple le portrait de Louis XV d’après le tableau de Louis- Michel Van Loo, tissé en 1763.

19ème siècle
Après la Révolution, les tapisseries devaient glorifier le règne napoléonien : Peste de Jaffa d’après Jean-Antoine Gros et Bonaparte traversant le Saint-Bernard d’après Jacques-Louis David. La tradition des visites officielles a repris et l’Empereur a offert au Pape une pendaison du Nouveau Testament pour sa visite en 1805.

Jusqu’au Second Empire, le goût pour les portraits ne faiblit pas : vingt-huit sont notamment réalisés pour la galerie d’Apollon du Louvre. Les peintres contemporains apportent également leur contribution. Entre 1818 et 1827, les ateliers se consacrent à la réalisation de la tapisserie de La Bataille de Tolosa, d’après Horace Vernet.

De 1860 à 1871, les Gobelins et Beauvais sont réunis sous la direction de Pierre-Adolphe Badin, qui lance un important programme de décoration textile pour les palais impériaux ; citons les Cinq sens selon Diéterle, Baudry, et Chabal-Dusurgey.

20ième siècle
Rattachée à l’administration du Mobilier national depuis 1937, la Manufacture nationale des Gobelins tisse, comme il y a quatre siècles, des tapisseries à partir d’œuvres contemporaines (Marcel Gromaire, Pierre Dubreuil, Jean Arp, Fernand Léger, Alexandre Calder, Sonia Delaunay, Jean Dewasne, Serge Poliakoff, Jean-Paul Riopelle, Eduardo Arroyo, Gérard Garouste, Louise Bourgeois, Patrick Corillon, Hervé Télémaque, Ung no Lee, Gudmundur Erro, Jean-Michel Alberola…) témoignant ainsi des multiples possibilités d’un mode d’expression ouvert à toutes les tendances esthétiques et contemporaines.

L’acte de création est aujourd’hui un dialogue fécond qui se noue avec les artistes. C’est un acte de transposition en termes textiles d’une écriture initialement picturale ou photographique. Le tissage n’est pas une simple copie, même si le carton est adapté d’un modèle préexistant. Le carton, aujourd’hui agrandissement photographique réalisé par les tisserands et éventuellement retouché par l’artiste, constitue une étape vers une nouvelle création qui devra son originalité au nouveau matériau, au travail des teinturiers et au talent du tisserand. De ce dialogue naissent souvent des modifications du projet qui font de l’œuvre tissée une co-création.

Aujourd’hui, la manufacture se compose d’un ensemble de quatre bâtiments irréguliers datant du XVIIe siècle, auquel s’ajoute le bâtiment de l’avenue des Gobelins construit par Jean-Camille Formigé en 1912 après l’incendie de 1871. Ils abritent la demeure de Le Brun et des ateliers qui ont servi de fonderies à la plupart des statues de bronze du parc de Versailles, ainsi que des métiers sur lesquels sont tissées des tapisseries selon les techniques du XVIIe siècle. L’usine est toujours en activité aujourd’hui en tant qu’institution gérée par l’État. Les Gobelins produisent encore une quantité limitée de tapisseries pour la décoration des institutions gouvernementales françaises, avec des sujets contemporains.

Le bâtiment
Depuis plus de quatre siècles, le Mobilier national rayonne sur un site unique au cœur de la capitale, l’enceinte des Gobelins, véritable havre de paix mêlant monuments historiques et jardins. Le Mobilier national est installé depuis cette date dans un bâtiment construit par Auguste Perret sur les anciens jardins de la fabrique des Gobelins et l’enceinte historique des Gobelins, dont les bâtiments, répartis autour de plusieurs cours, remontent en partie au XVIIe siècle. Un village préservé au coeur de Paris, lieu d’histoire et de création.

Au centre, un bâtiment allongé avec un décor de trophées et de guirlandes sur sa façade sud. C’est l’ancienne demeure de Charles Le Brun, premier directeur de la manufacture qui y mourut en 1690. En face, la très longue bâtisse du rez-de-chaussée, aux murs jaunes, abritait l’atelier de haute lisse du tapissier Jean Jans, actif de 1662 à 1668. C’est aujourd’hui l’un des deux ateliers de la Manufacture des Gobelins.

Dans la cour Colbert, se dresse l’ancienne chapelle de la manufacture (chapelle Saint-Louis), construite en 1723 pour les tisserands des Gobelins, qui a conservé son décor intérieur d’époque, notamment une corniche stuquée. Désacralisé dans les années 1960, il abrite aujourd’hui à la fois des tapisseries patrimoniales et des œuvres d’artistes contemporains (Combas et Kijno, Vincent Bioulès) autour du sacré. A droite de la chapelle Saint-Louis se trouve l’atelier de teinturerie, occupé au XIXe siècle par le chimiste Eugène Chevreul (1786-1889), toujours en activité.

Le long de l’avenue des Gobelins, la galerie des « Gobelins », en brique et pierre, qui date de 1914. Elle a été construite d’après les plans de l’architecte Jean-Camille Formigé, à l’initiative du critique Gustave Geffroy, nommé administrateur du Gobelins en 1908. On remarque sur la façade principale quatre cariatides d’Antoine Injalbert et un bas-relief sculpté par Paul Landowski : Le Triomphe de l’Art ; ainsi que huit médaillons, La Fileuse, La Teinture, Le Carton, La Tapisserie… de Louis Convers et Jean Hugues, qui rendent hommage aux différents métiers et étapes du tissage.

La Galerie des Gobelins, construite en 1914 par l’architecte Jean-Camille Formigé, accueille les expositions temporaires du Mobilier national. Il se compose de deux plateformes d’environ 450m² chacune et peut accueillir jusqu’à 500 personnes.

Galerie des Gobelins
A l’initiative d’Arnauld Brejon de Lavergnée, la Galerie des Gobelins a rouvert ses portes en 2007 en tant qu’espace d’exposition des collections du Mobilier national pour célébrer les 400 ans de la création de la Manufacture des Gobelins par Henri IV.

Collections
Constituées principalement de mobilier commandé pour les grandes demeures de l’État, les collections du Mobilier national offrent un reflet fidèle de l’évolution du mobilier de fonction en France du XVIIe siècle à nos jours. Le Mobilier national, héritier du Garde-meuble de la Couronne et du garde-meuble Impérial, possède aujourd’hui une collection de 130 000 pièces (tapisseries, tapis, meubles, horloges, lustres, céramiques, textiles historiques, dentelles, etc.)

Technique
Depuis 1662, année où Colbert décide de réunir les ateliers parisiens en un même lieu, la Manufacture des Gobelins, célèbre dans le monde entier, n’a cessé de marquer de sa signature l’histoire de la tapisserie. La Manufacture des Gobelins utilise exclusivement la technique de la Haute Poux depuis 1826.

Elle dispose de 15 métiers verticaux sur lesquels la chaîne, entièrement en laine, est tendue verticalement entre deux ensouples. Un fil sur deux est agrémenté d’une chaîne, un petit cordon de coton formant un anneau. C’est en activant les chaînes d’une seule main, d’où le nom de licier, que l’on obtient le croisement des fils nécessaires à l’exécution du tissage. La trame est réalisée à l’aide d’une broche en bois chargée de laine, soie, lin… qui est passée entre les fils de chaîne. L’osier est assis derrière le métier à tisser, les listes sont placées au-dessus de sa tête, d’où le nom du métier à tisser Haute poux.

Le tisserand tisse à contre-jour sur l’envers de la tapisserie, en contrôlant la zone au moyen d’un miroir placé devant le métier à tisser. Le modèle grandeur nature est posé sur son dos. Le licer place du papier transparent sur le modèle afin de noter les lignes, les formes, les valeurs, toutes les indications techniques qui lui semblent importantes pour la réalisation. Il transférera ensuite ces marques à l’aide d’un petit bâton encré sur les fils de chaîne.

Ces traces serviront à s’identifier lors des travaux. Le castor peut alors commencer à tisser. Tous les quarante centimètres, il enroule son tissage puis recommence l’opération des traces et ce jusqu’à la réalisation de la pièce que l’on ne découvrira dans son intégralité que le jour de la chute du métier. Chaque tapisserie porte le monogramme de la manufacture un « G » avec en travers le dessin du fuseau qui sert à tisser.

L’Ecole Nationale des Arts Textiles du Meuble :
Le Mobilier national dispense, au sein de son Ecole des Arts Textiles, une formation initiale complète au métier de tapissier ou tisserand de tapis dans les usines des Gobelins, Beauvais et Savonnerie, et au métier de tapissier ou rentrée de tapis dans les ateliers de restauration.